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[Chronique Cinéma] Star Wars Episode VII. Le Réveil était à l’heure !

17 décembre 2015

Le Réveil de la Force est de loin le film que j’ai le plus attendu ces deux dernières années, avec les risques habituels que cela comporte, la déception étant souvent de mise dans ce genre de cas. D’autant plus après avoir sacrifié l’essentiel de mes soirées dernièrement à revoir et critiquer les six films existants.
Allait-on retrouver l’essence des trois épisodes les plus anciens ? Peut-on seulement faire aussi bien dans un contexte cinématographique et culturel si différent ? Disney allait-il phagocyter la saga à sa sauce comme beaucoup le craignaient ? Et surtout le film allait-il avant être un bon et grand divertissement comme finalement peu de blockbusters le sont de nos jours ? Il est en réalité difficile de répondre totalement par l’affirmative ou la négative à toutes ces questions. Je vais tâcher de le faire en spoilant le moins possible, mais je ne conseille toutefois pas la lecture de ce qui va suivre sans avoir vu le film. Vous êtes prévenus.

Je n’avais guère de doute sur les capacités de J.J. Abrams à s’imprégner de Star Wars, son univers et bestiaire inimitable et le choix de la production s’avère sans surprise payant. Le metteur en scène n’a pas son pareil pour retranscrire et réhabiliter un univers existant. Il s’en est fait même une spécialité depuis son arrivée sur le grand écran en relançant, certes un peu timidement, la franchise Mission Impossible, dépoussiérant plus récemment celle de Star Trek et en calquant le Spielberg des eighties pour Super 8. Chaque plan de l’épisode VII transpire l’amour qu’Abrams éprouve pour Star Wars. Presque un peu trop, ce qui l’empêche par moment de faire son propre film, mais j’y reviendrai plus tard.
Visuellement, le film est vraiment agréable. Le retour à des technologies réelles plutôt qu’à l’abus de CGI permet de remettre de la vie dans un univers qui avait en partie perdu de son côté palpable, notamment sur l’Attaque des Clones. A contrario, cela implique aussi que les quelques personnages entièrement conçus en image de synthèse peuvent un peu jurer avec le reste, tout en étant foncièrement vraiment bien fichus, notamment Maz Kanata qui est particulièrement bien animée. Cela joue aussi je pense sur l’impression plus que mitigée laissée par Snoke, même si ses apparitions ne laissent pas vraiment la possibilité de connaître plus que son nom et son visage. J’espère que le choix d’en faire un personnage virtuel se verra justifié par la suite. Quoiqu’il en soit, le personnage est pour l’heure à ranger parmi les points négatifs, tout du moins contrariant du Réveil de la Force.

Toujours sur l’aspect esthétique, un des reproches qui sera fait au film sera son manque de fraîcheur parmi les environnements présentés. Jakku ne peut que faire penser à Tatooïne et la Starkiller se veut un mix entre une Etoile Noire, Hoth et Endor. Niveau originalité, on a clairement vu mieux, mais quelque part c’est à l’image du film qui se veut en grande partie un hommage et un best of de la trilogie originelle, avant peut-on encore espérer de suivre un chemin nouveau et moins balisé dans les épisodes restant à venir.

Le fan service est évidemment de rigueur de bout en bout. Les clins d’œil au passé sont extrêmement nombreux, l’apparition de chaque ancien est orchestrée de façon à provoquer la réaction des fans. Dans la plupart des cas, l’effet fonctionne, si ce n’est peut-être pour Leïa qui se voit un peu voler la vedette par un autre comeback. Cet aspect du film est dans tous les cas infiniment mieux géré que sur un Jurassic World par exemple cette année dans lequel ce type d’ajout paraissait bien plus lourdingue à l’écran. Et ils sont souvent l’occasion de touches d’humour plutôt bienvenue.
D’ailleurs, si celles-ci ont toujours été partie prenante de la saga, notamment dans l’utilisation en fil rouge de C-3PO et R2-D2, il est ici mis vraiment plus en avant. Han Solo retrouve son cabotinage perdu dans Le Retour du Jedi et le nouveau duo Rey-Finn est l’occasion de quelques passages plutôt drôles. Même Kylo Ren a droit à son court instant comique. Quand à BB-8, il est sans surprise une des meilleures nouveautés de l’épisode et sera un ajout dépoussiérant notre duo habituel. Est-ce un des effets du passage du passage sous le giron Disney ? C’est bien possible.

Les nouveaux, parlons-en justement parce qu’ils représentent très certainement le point fort de ce nouveau départ. Daisy Ridley campe une Rey pour le moins irrésistible, à mille lieux de l’agaçant Hayden Christensen de la prélogie. Femme forte comme le cinéma hollywoodien en créé de plus en plus ces dernières années, bien que contrairement aux polémiques qui commencent à poindre ici et là, ça n’a rien de spécialement nouveau, elle a tout pour être la grande héroïne que peu de sagas sont capables de créer. L’attachement est quasi immédiat (aussi immédiat que son évolution un chouilla abusée) et il en est de même pour Finn, pour qui les trailers m’avaient laissé un peu plus sceptique. Sidekick valeureux et sans conteste amené à jouer un rôle primordial, il campe un personnage jusqu’ici surtout comique, et apporte un point de vue encore peu vu jusqu’ici avec sa connaissance du Premier Ordre que peu de personnages du bon côté de la barrière ont eu dans la saga.

Mais celui qui m’a peut-être le plus marqué est finalement Kylo Ren. Je vois déjà pas mal de critiques se contenter de le taxer de “fanboy du pauvre de Vader” et je ne suis pas vraiment d’accord. Il est vrai que lors de ses premières apparitions il ne semble être qu’un ersatz de celui considéré aujourd’hui comme l’un des plus grands méchants de l’Histoire du cinéma, mais les minutes passant, si son ombre ne cesse de planer, Kylo Ren semble plutôt destiné à devenir son antithèse. Tout aussi tiraillé entre deux mondes, il s’avère vraisemblablement bien moins puissant que son prédécesseur, pour ne pas dire faible. Mais paradoxalement il réussit à trouver la force psychologique de faire un choix, un acte dur et lourd de conséquence que Darth Vader n’a pas su faire en son temps. Je suis vraiment curieux de voir le développement qui lui sera consacré dans le prochain épisode. Il y a de quoi faire un grand personnage à mon sens. Et Adam Driver saura parfaitement le camper je n’en ai pas le moindre doute.

Si le film prend le temps de présenter et d’apporter au moins un début de background à chacun de ses nouveaux protagonistes importants, il est en revanche bien plus avare de détails sur le background global du scénario et d’infos sur les évènements post-épisode VI. C’est regrettable dans la mesure où, si je suis heureux du retour au source effectif, j’aurais aimé que le film conserve l’apport politique apporté par Lucas via ses prequels. Malheureusement on n’en saura pas plus pour le moment, que ce soit sur les fondations du Premier Ordre, les origines de Snoke ou les véritables raisons qui ont poussé Luke Skywalker et Kylo Ren à être dans leur situation actuelle. Inutile également d’évoquer le Captain Phasma tant son rôle est anecdotique. Une simple et vague présentation avant sans doute de la revoir plus longuement dans deux ans.

Ce qui m’amène à évoquer le principal point noir de ce 7ème opus. Jusqu’ici, Star Wars était une grande saga au(x) fil(s) rouge(s) prenant une place importante mais dont chaque épisode pouvait finalement se voir et tenir indépendamment. Tous possédaient un début, un milieu et une finalité. Cette fois, Disney, je suppose, n’a pu s’empêcher de plus ou moins imposer le format épisodique cher aux blockbusters hollywoodiens du moment. Le Réveil de la Force ressemble ainsi plus à une longue introduction qu’à un véritable film. Il est probable que ses qualités en soient que grandies lorsque l’on pourra reconstituer le puzzle et voir le scénario dans sa globalité, mais pour le moment il en résulte un petit sentiment de creux. Cela dit, pas vraiment plus que ceux de A New Hope et du un peu surestimé Retour du Jedi avec le recul.

Abrams semblait avoir conscience de ces limites scénaristiques quand on voit le rythme qu’il imprime au récit. Pendant plus de 2h, le film laisse peu le temps de souffler. A peine se donne-t-il le temps de s’attarder sur nos nouveaux héros mais en dehors de ça, la course poursuite reste effrénée tout du long.
Si cela aide à tenir le spectateur en haleine, le résultat en perd par contre un peu de personnalité. En se contentant un peu trop de jouer de son mimétisme, de brosser les fans échaudés par la prélogie dans le sens du poil, il a un peu oublié d’y apposer une véritable touche personnelle, si ce n’est sur quelques plans.

Malgré ses défauts plus ou moins impactants, j’ai passé un superbe moment en salles et n’en suis vraiment pas ressorti déçu. L’avenir dira à quel niveau je le place dans le saga, mais à chaud (ou tiède maintenant plutôt), je n’ai pas trop de scrupules à le placer à un niveau similaire à celui de l’épisode VI. Je retournerai sûrement le voir en salles dans quelques semaines, dans un contexte moins fanatique et à tête plus reposée. J’affinerai peut-être mon avis à ce moment-là.

J’espère tout de même que, maintenant que le décor est planté, que les anciens ont tous eu droit à leur retour en grâce et que la direction artistique est bien mise en place, la suite saura nous surprendre un peu plus, se départir de l’effet nostalgie qui pousse au déjà-vu, tout en élevant et approfondissant ses thématiques. Déjà pressé d’être dans deux ans moi !


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